Des « jeux gays » à Moscou: La Russie à l’épreuve des droits des homosexuels

L'équipe de la rédaction d'Africa Top Sports




LGBTDes « jeux gays » en Russie ? Cela s’appelle un véritable défi à la limite de la provocation. Mais c’est ce que veut bien faire la Fédération sportive LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels). La LGBT prévoit l’organisation à Moscou des « jeux gays ». Un projet à la fois ambitieux et périlleux dans un pays en croisade terrible et permanente contre l’homosexualité.

« C’est un projet de très grande envergure que nous n’avons jamais organisé jusqu’ici« , a déclaré à l’AFP la coprésidente de la Fédération LGBT, Elvina Iouvakaïeva. Et la LGBT n’a pas choisi n’importe quel moment pour réaliser son projet : juste à la fin des JO de Sotchi et peu avant les Jeux Paralympiques. Ces jeux se tiendraient pendant cinq jours, du 26 février au 2 mars 2014, après les JO de Sotchi mais avant les jeux Paralympiques, du 7 au 16 mars. Iouvakaïeva explique le choix de cette période. « C’est un signe (…). Nous espérons attirer l’attention de sportifs et ceux qui couvrent les jeux de Sotchi« , a-t-elle dit.

Quelle audace !

L’événement pourrait entraîner des attaques homophobes ou tout simplement être interdit dans un pays où l’homophobie est largement répandue. L’homosexualité y était considérée comme un crime jusqu’en 1993 et comme une maladie mentale jusqu’en 1999. Le président Vladimir Poutine a même promulgué en juin dernier une loi punissant d’amende et de prison la « propagande » homosexuelle devant mineurs, un texte jugé imprécis et discriminatoire par nombre de défenseurs de droits de l’homme. Cette loi a aussi provoqué de vives critiques en Occident, auxquelles se sont jointes des célébrités telles les chanteuses de pop américaines Madonna et Lady Gaga.

Droits des homosexuels, la Russie s’en moque !

En août dernier, la perchiste russe Yelena Isinbayeva avait suscité une vive polémique en prenant la défense de la loi interdisant la « propagande » homosexuelle devant mineurs. « La propagande des relations non traditionnelles serait un grand signe de non-respect des citoyens de notre pays et de nos lois« , avait-elle déclaré avant de se voir obligée de revenir plus tard sur ses propos.

Récemment, le député Milanov, auteur de cette loi homophobe, a même directement accusé l’Europe de promouvoir ce qu’il appelle la dégradation des valeurs morales. « François Hollande lutte contre les valeurs chrétiennes en promulguant la loi sur le mariage pour tous », avait-il lancé à Julien Pain et toute l’équipe de des « observateurs » de France 24 dépêchés en Russie pour couvrir une manifestation des lesbiennes. La France, elle, a déjà obtenu quitus pour l’organisation des « gays games » de 2018. Une abomination, dirait Milanov.Gold medallists team Russia celebrate at the women's 4x400 metres relay victory ceremony during the IAAF World Athletics Championships at the Luzhniki stadium in Moscow

Toutes les sollicitations de la LGBT déjà adressées aux autorités russes en vue d’obtenir des subventions sont tout simplement jetées dans des placards.

L’espoir est-il permis?

Les organisateurs des « jeux gays », dont les disciplines comprendront notamment le tennis, la natation et le ski de fond, estiment qu’un tel événement ne tombe pas sous le coup du texte. « Nous n’invitons pas de mineurs à nos événements« , souligne Mme Iouvakaïeva. « Je suis sûr que nous n’aurons aucun problème« , estime pour sa part le cofondateur de l’association, Konstantin Iablotski, un amateur de patinage artistique ouvertement gay, professeur de chimie dans une école de Moscou. L’ancien plongeur américain médaillé d’or Greg Louganis, ouvertement homosexuel, a déjà promis de venir: « Il m’a dit personnellement qu’il nous soutiendrait« , a indiqué M. Iablotski.

Quant aux célébrités russes, les organisateurs des « jeux gays » nourrissent peu d’espoir.

Les premiers « jeux gays » ont été organisés en 1982 à San Francisco, aux Etats-Unis. La Russie accusée de racisme et d’homophobie cèdera-t-elle pour que ces jeux se déroulent sur son sol ? Mme Iouvakaïeva se dit confiante. « Nous voulons dialoguer avec les autorités, les ONG et le public« , a-e-elle affirmé et d’ajouter « nous voulons faire un effort pour arriver à ce que notre communauté ne soit plus stigmatisée« . On verra bien !


Articles récents