Equipements, conditions de préparation, coach impayé: les Eperviers du Togo crient leur ras le bol

L'équipe de la rédaction d'Africa Top Sports




C’est l’information du jour. A l’image des Aigles du Mali qui ont fait grève jusqu’à la dernière minute la semaine écoulée pour réclamer de meilleures conditions de préparation avant le match amical contre le Burkina Faso (4-1), les Eperviers du Togo font désormais front.

Dans un courrier signé par Serge Akakpo avec les participations d’Alaixys Romao, Mamah Gafar, Sadate Ouro Akoriko, Serge Gakpé, Ayité Jonathan, Mathieu Dossevi et Cédric Mensah, et dont nous avons obtenu copie; les Eperviers mettent les dirigeants du football local devant leurs responsabilités. Du match amical annulé contre l’Egypte en cette trêve internationale à la préparation pour le 2è tour des éliminatoires de la Coupe du monde 2018, en passant par les soucis d’équipements, les joueurs de l’équipe nationale du Togo affichent leur raz le bol.

Lire l’intégralité du courrier adressé au Comité de Normalisation et au Ministère des Sports notamment.

 

Lettre ouverte au Comité de Normalisation 

de la Fédération Togolaise de Football,
au Ministère de la jeunesse et des Sports, ainsi

qu’a l’ensemble de nos dirigeants « Passés » et « Futurs »

1- Annulation du match amical et conséquences
1.1- L’annulation du match amical
       Suite à l’annulation du match amical contre l’Égypte, comptant pour la journée Fifa du
mois d’octobre 2015, nous l’ensemble des joueurs, sommes résignés.
J’ai reçu des appels de la majorité des joueurs et je n’ai pas su trouver les mots ni les arguments
afin de maintenir leur motivation intacte. D’après l’un d’entre eux, nous sommes le seul pays
africain à ne pas avoir joué de match en ce mois d’octobre.
Et pour nos clubs aussi la situation est un peu confuse, déjà qu’ils ont du mal à accepter de
nous libérer car les voyages sont longs et éprouvants, dorénavant difficile pour eux de prendre
notre équipe nationale au sérieux.
1.2- Les conséquences
       La première conséquence c’est que nous n’avons pas de préparation pour la double
confrontation contre l’Ouganda au mois de Novembre prochain, alors que c’est un match crucial
pour notre avenir en tant que joueurs, mais aussi pour celui du football togolais.
Je vous rappelle qu’en cas de défaite, le Togo ne fera pas les éliminatoires de la prochaine coupe
du monde Russie 2018.
2- Rappel / Retour sur la chronologie des faits
2.1- Rappel des faits
       En Septembre 2013, juste après notre victoire et dernier match de qualifications contre la RDC
à Lomé, j’ai eu un entretien téléphonique d’environ trente (30) minutes avec le ministre des finances,
son Excellence Monsieur Ayassor (que je remercie d’ailleurs pour la disponibilité dont il a fait part)
concernant les journées Fifa des mois suivants, en présence du ministre des sports de l’époque son
Excellence Monsieur Bakalawa.
Le Ministre Ayassor m’a expliqué de long en large comment fonctionnait à son niveau les dépenses,
qu’on lui envoie le budget global alloué au football, et que si celui ci était mal géré par la suite,
il n’avait pas la possibilité de l’étendre davantage, car le pays à d’autres besoins que le football.
Donc en clair, qu’il n’avait plus d’argent pour financer les journées Fifa d’octobre et novembre 2013.
Ses arguments étaient solides, précis et très clairs.
Mais sans manquer de respect à qui que ce soit, je tiens tout de même à rappeler à chacun des
acteurs, que les dates Fifa sont fixées 2-3 ans à l’avance. Le Togo étant un pays membre de la FIFA,
tous ces matchs à venir devraient logiquement êtres inclus dans le budget initial.
2.2- Proposition des joueurs de jouer sans primes
       Suite à cet entretien, après m’être entretenu avec les plus anciens du groupe présents à ce
moment (Moustapha Salifou, Alayxis Romao, Amewou Komlan, Daré Nibombé, Mamah Gafar,
Gakpé Serge, Sadate Ouro Akoriko), en présence du coach Didier Six, de membres du ministère
des sports et des finances, et comme témoin Dimas Dzikodo qui était venu me rendre visite à l’hôtel
Sarakawa, j’ai fais la proposition de jouer gratuitement tous les matchs amicaux qui venaient.
Pas de primes de sélection ou de campement, ni de primes de matchs. Tout ce qu’il fallait faire c’était
de trouver un match et d’organiser la logistique.
Les joueurs avaient donné leur accord, nous ne le faisons pas pour l’argent mais bien pour l’amour de
notre pays, et nous sommes des hommes responsables, nous voyons plus loin que des primes de
matchs amicaux.
Mais malgré notre proposition, nous n’avons pas eu de matchs où de regroupements pendant
un (1) an entier!! (De septembre 2013 à Septembre 2014)
2.3- Conséquences
       On s’est retrouvé en septembre 2014 pour jouer directement les éliminatoires de la CAN Maroc
2015 avec à notre disposition énormément de moyens, tout ce dont on avait besoin et bien plus encore.
Sauf qu’après réflexion, il aurait plutôt fallu avoir à ce moment un peu moins de moyens, et une partie
aurait pu servir à jouer des matchs amicaux durant l’année écoulée…
Déjà en club en s’entraînant tous les jours ensemble on a parfois du mal le week-end, alors imaginez
une équipe nationale qui ne se voit d’habitude que 5-6 fois par an, mais qui la, ne s’est pas vu
pendant un an!!
Résultat, une élimination sans appel pour la CAN 2015 avec un sanglant 1-4 à domicile contre
la Guinée que je n’ai toujours pas digéré.
2.4- L’histoire se répète-t-elle?
       Le mois dernier, en septembre 2015 à Djibouti, lorsqu’on m’a fait part des difficultés pour la
journée Fifa de ce mois d’octobre, sachant l’importance des échéances à venir, encore une fois après
avoir consulté les joueurs, j’ai fais la proposition de jouer gratuitement mais nous voilà à la maison à
regarder les autres nations jouer à la télé.
Comment pensez vous que le mois de novembre sera? Je vous laisse faire vos propres conclusions…
3- Calendrier des deux matchs de novembre à venir
3.1- Les dates
       Par ailleurs les deux matchs aller/retour contre l’Ouganda sont prévus selon mes informations,
Il est physiquement pratiquement impossible d’être prêt pour ces deux matchs.
Nous jouerons le championnat dans nos clubs respectifs le week-end du 7-8 novembre, voir peut être
le lundi 9 pour certains.
Ce qui veut dire qu’au mieux, un joueur sélectionné pour ces deux rencontres peut arriver à Lomé
S’il vous plaît, on aimerait savoir sur quoi, vous nos dirigeants, vous êtes vous basé pour prévoir
les matchs a ces dates!? Éclairez nous!!
Nous jouons l’Ouganda que nous avons battu il y a un an, deux fois en quatre jours sur le score
de 0-1 et 1-0. Nous avons fait tomber leur record d’invincibilité à domicile vieux de plus de dix ans.
Il faut s’attendre à une équipe revancharde qui viendra à Lomé avec des envies de tout renverser!!
3.2- Les dates convenables
       Les journées Fifa de novembre sont officiellement prévues par la FIFA entre le lundi 9 novembre 
Nos dates de match de novembre sont à changer, on ne peut pas jouer dans ces conditions. Si nous
voulons mettre les chances de notre côté, le match aller surtout qu’il est à domicile, doit se jouer
au moins le vendredi 13 novembre à Lomé et le match retour le mardi 17 novembre à Kampala.
Soit nous changeons les dates pour augmenter nos chances de qualifications, soit faut se rendre
à l’évidence que la seule chose que l’on risque de gagner c’est la HONTE, comme c’était le
cas il y a un an déjà.
Mais cette fois ci, et je pèse mes mots, il ne faudra pas compter sur nous!!
4- Équipements / Sponsor / Puma
4.1- Le grand mystère
       Les équipements restent à ce jour un mystère pour nous. Difficile de constater qu’un pays comme
le Togo, sponsorisé par Puma, qui a fait la coupe du monde 2006, qualifié à la CAN 2010, fait un 1/4
de finale de CAN 2013, se retrouve depuis 2013 sans contrat officiel avec son sponsor.
En même temps avec tous nos problèmes à répétition, comment voulez vous qu’un sponsor digne
de ce nom accepte nos doléances?
4.2- Le contexte visuel
       Nous représentons une équipe nationale, un pays, des valeurs, une nation, nous ne pouvons
pas nous permettre de nous habiller comme c’était le cas à Djibouti le mois dernier, avec de faux équipements/Abloni achetés au marché à Lomé. C’est une honte pour nous tous, pour chaque
togolais sans exception, du sommet du pays jusqu’en bas.
5- Notre terrain de Kégué
5.1- L’état du terrain
       Depuis mes débuts en sélection, le problème du terrain a été récurrent chaque année, et je
pense que le problème était bien présent avant. L’année dernière il a fallu qu’on monte au créneau a
quelques heures d’un match important pour avoir un semblant de terrain.
Je ne suis pas en train de dire qu’avec un terrain parfait nous allons gagner tous nos matchs, mais
au moins ça fait partie des petites choses qui assemblées les unes aux autres donnent le maximum
de chances d’y arriver.
L’équipe est composée aujourd’hui en majorité de joueurs qui évoluent en Europe ou dans des
grands championnats africains, et qui pour 60% ont été formés en Europe. Ce qui veut dire que
nous sommes habitués à jouer sur des terrains mieux entretenus. Revenir à Lomé pour jouer sur
un terrain impraticable ne fait que diminuer nos chances de gagner. Alors il est temps que l’on aie
un terrain digne d’une équipe nationale qui se respecte.
Si le terrain de Kégué ne peut plus être rénové, alors trouvons un autre terrain plus adapté
et allons jouer là-bas. Beaucoup de joueurs, moi même y compris, sommes aussi originaires du Nord
du pays, si un meilleur terrain peut nous accueillir a l’intérieur, pourquoi pas?
6- Le coach actuel et ceux à venir dans le « futur » de l’équipe
6.1- Ses impayés
       Nous avons un nouvel entraîneur depuis officiellement le mois de Juin 2015. En cinq (5) mois il
a déjà plus de 3 mois sans salaires qu’avec et il n’a pas de logement à Lomé alors que son contrat
stipule qu’il doit vivre à Lomé pour aider à développer le football local. (Dont le championnat
n’a toujours pas démarré d’ailleurs)
Malgré cela, il n’a fait aucune déclaration négative à ce propos à la presse, il s’est concentré
uniquement sur le sportif et le terrain. C’est une grande preuve de loyauté de sa part, et ça montre
à quel point il est investi dans sa tâche.
Il n’a jamais raté une seule séance d’entraînement et n’a jamais abordé ce point devant le groupe.
6.2- Les risques
       Avoir un coach sans le payer peut avoir de lourdes conséquences pour l’équipe. Déjà au sein
du groupe ça peut instaurer une mauvaise ambiance, et une atmosphère qui n’est pas propice à
la victoire sur le long terme.
Pour qu’une équipe nationale soit performante, tout le monde doit être sur le même piédestal, chacun
est égal à l’autre sans exception, les joueurs, le staff technique et médical. C’est aussi ce qui crée
une harmonie qui se traduit par des victoires sur le terrain.
Mais encore pire qu’une mauvaise atmosphère, cette situation induit que le coach à n’importe quel
moment, peut se lever et démissionner du jour au lendemain. Ça peut arriver juste avant un
rassemblement par exemple, ou à la veille d’un grand match aussi. Nous les joueurs ne voulons
plus prendre ce genre de risques, nous ne voulons plus évoluer dans ces tensions qui nous
mènent le plus souvent à l’échec.
7- Conclusion
7.1- Ras le bol total
       Nous sommes fatigués, cette pièce de théâtre dure depuis trop longtemps, et nous ne voulons
plus en faire partie ou pris en otage entre les différentes parties.
Nous prenons environ 20-25 vols par saison juste pour la sélection, ce sont des risques pour nous,
nos familles ainsi que nos proches.
Nous voulons savoir à quoi nous en tenir désormais, si nous n’allons pas tous dans la même direction,
autant nous le dire, que chacun des acteurs prenne ses dispositions à l’avenir.
7.2- Rappel du contexte actuel de l’équipe
       Par dessus tout, nous sommes là pour écrire l’histoire du football togolais, qui constitue aussi
l’histoire du pays, comme l’ont fait nos grands frères en se qualifiant pour la Coupe du Monde 2006,
et montrer au monde entier que ce petit pays n’est petit que par sa taille.
Mais parlant justement de 2006 (ma première sélection date d’Août 2008) et cette coupe du monde
qui était censé nous propulser comme nos voisins ghanéens ou ivoiriens, force est de constater que
depuis 9 ans, à l’exception de quelques victoires isolées, nous vivons un réel cauchemar qui ne fait
que se répéter. C’est comme si finalement le Togo n’était associé qu’aux drames dans le football mondial…
Nous avons aussi un devoir moral envers nos supporters, qui contre vents et marrées remplissent
le stade de Kégué, et ne manquent pas de nous soutenir à chaque occasion même à l’extérieur.
Le Togo possède à ce jour une équipe jeune, volontaire, pleine d’envie et talentueuse.
Beaucoup de pays n’ont pas notre effectif mais ils jouent les premiers rôles en Afrique.
Nous voulons trouver une solution concrète et durable, mais s’il faut que notre génération se sacrifie
pour que nos petits frères aient la paix, croyez moi, nous sommes déjà sur le chemin de la révolution!!
Cette lettre est clairement un appel de détresse. En accord avec l’ensemble des joueurs de
l’équipe nationale, MESSIEURS, s’il vous plaît, rendez nous notre football!!
Avec les participations de:
Alaixys Romao, Mamah Gafar, Sadate Ouro Akoriko, Serge Gakpé, Ayité Jonathan,
Mathieu Dossevi et Cédric Mensah.
Seul on va plus vite, mais ENSEMBLE on ira plus loin.
Le combat continue
Un des leaders de l’équipe,
Serge Akakpo

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