Athlétisme : Elvis Faï,  au sommet du Mont Cameroun pour la première fois

Journaliste à Africa Top Sports Premier portail sportif Africain https://www.africatopsports.com




Le jeune athlète a remporté la 22ème édition de la Course de l’Espoir courue le samedi 25 février 2017 à Buea, le chef-lieu de la région camerounaise du Sud-Ouest. La légende vivante de cette épreuve, Sarah Liengu Etonge, est sortie de la retraite pour l’occasion. Elle est venue courir « pour la paix au Cameroun ». Dans un contexte tendu par le bras de fer entre les régions anglophones (dont son cher Sud-Ouest) et le pouvoir central. Reportage.

11 heures 26 minutes ce samedi 25 février  2017 au stade rénové de Molyko à Buea. C’est le moment où le grand vainqueur de la 22ème  édition de la Course de l’Espoir franchit la ligne d’arrivée. Les journalistes et autres chasseurs d’images se bousculent  pour immortaliser l’instant alors que le speaker scande le nom et le numéro de dossard du nouveau héros. Il s’agit d’Elvis Faï Ndzezemi. Il gagne l’épreuve pour la première fois. Cela fait 11 ans qu’il y participe. Ses meilleures performances jusqu’ici étaient une place de 4ème en 2010 et 2015 et un rang de 6ème l’an passé. Elvis Faï l’emporte sur le fil. Sur un coup du sort. Lui dirait un coup de chance. Car il prend la tête de la course à une petite distance de l’arrivée.

Alors que Godlove Gabsibuin le leader se fait trahir par ses chaussures.   « Au niveau de l’endroit appelé  Mbongo Square alors que je m’apprêtais à semer définitivement mes poursuivants, j’ai eu un problème avec mes chaussures. Vous conviendrez avec moi que si dans une course vous avez un problème avec vos chaussures, vous ne pouvez plus concourir comme il faut. Je suis très déçu. Je reviendrais l’an prochain avec de bonnes chaussures et je prendrai ma revanche», déclare le déjà triple vainqueur de la Course de l‘Espoir (2012, 2013 et 2016). Il n’aura accusé qu’une minute de retard sur son devancier arrivé en tête avec un chrono de 4 heures 25 minutes 8 secondes.  « Il perd cinq millions de Francs CFA pour une minute perdue », commentent l’air  triste  des spectateurs en imaginant la prime du vainqueur.

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Elvis Faï  sur un coup du sort

Elvis Faï tout comme la meilleure athlète de la catégorie dames empoche en effet  dix  millions de Francs CFA. Les deuxièmes ne gagnent que la moitié de cette somme.      L’arrivée du troisième   garçon ne laisse personne indifférent dans le stade. Samuel Lyonga Essome arrive sous les vivats et youyous. Ce concert joyeux est dû à la filiation du jeune soldat de l’armée camerounaise. C’est l’un des fils de la meilleure athlète de toute l’histoire de l’Ascension du Mont Cameroun Sarah Liengu Etonge. Il retrouve la troisième  place qu’il avait déjà occupée en 2015. Et empoche deux millions de Francs CFA.  L’arrivée de sa mère, revenue dans la compétition ce samedi après une retraite qui dure depuis quatre ans est désormais la plus attendue. Le public attendra avant de la voir.

Lizette Ngalim (première) Yvonne Ngwaya (deuxième) et Wirngo Kpuufala  (troisième) franchissent la ligne d’arrivée et brisent les espoirs de ceux-là, très nombreux, qui espéraient voir le « docteur de la montagne » sur le podium  féminin. Manque de pot  car Sarah ne terminera  qu’en 9ème position. Elle franchit néanmoins la ligne d’arrivée sous les ovations du public. Des jeunes dont un de ses fils l’encadrent et courent avec elle. Elle-même ne semble pas gênée par sa performance. L’essentiel en revenant dans  la compétition était surtout de passer  ce message de paix et d’unité. « Je suis revenue pour ça », clame la fraîche quinquagénaire, drapeau camerounais sur les épaules et   encore debout sur ses deux jambes quand d’autres terminent leur course sur les genoux.

Il faut dire que la région du Sud-Ouest qui accueille depuis 1973 l’Ascension du Mont Cameroun (rebaptisée Course de l’Espoir en 1996) tout comme celle du Nord-Ouest, est sous tension depuis le mois de novembre 2016. Des revendications corporatistes en rapport avec l’usage de l’anglais langue officielle la plus parlée dans cette zone ont dégénéré en crise ouverte. Des exigences politiciennes s’y sont greffées. Ce qui  complique de façon sérieuse  la situation. Certains pensent que le contexte ainsi décrit est à l’origine du faible succès populaire de l’événement de cette année. L’on n’a en effet pas vu beaucoup de monde dans l’enceinte du stade de Molyko. Une enceinte désertée aussi par des sponsors dont le principal,  la société Guinness-Cameroun. Après s’être désistée de l’organisation en 1990 la multinationale qui lança l’Ascension du Mont Cameroun était revenue en 2014. Elle s’est retirée. « Pour ne pas se mettre en conflit avec les populations du Sud-Ouest, anglophones comme l’essentiel de ceux qui constituent la société Guinness », explique un expert en marketing.

Yvonne-Ngwaya-Lizette Ngalim : le chassé-croisé continue

Malgré toutes ces contingences, l’édition 2016 Ascension du  Mont Cameroun effectue un parcours que l’on pourrait qualifier d’« honorable ».  Le chef de projet Yves Désiré Ekwalla le confirme lui qui salue notamment la participation étrangère « grandissante au fil des ans ». Il y avait 12 pays représentés. Des pays comme la France, la Grande-Bretagne, les États-Unis, le Japon, la Chine, le Nigeria, la Guinee-Équatoriale, le Congo-Brazzaville ».
L’ancien athlète relève aussi parmi les points positifs les révélations de la catégorie junior. « Elle a permis de découvrir des jeunes loups aux dents longues dont l’ambition est de tutoyer les sommets dans peu de temps. C’est le cas de Hadidja Issa Tambaya de la région du Littoral âgée de 13 ans accompagnée de son frère, junior lui aussi et de son père qui concourt dans la catégorie vétéran », explique-t-il. La domination de la région du Nord-Ouest se confirme. Ses athlètes occupent entièrement les deux principaux podiums (seniors messieurs et dames). Par ailleurs deux amies continuent de confisquer les toutes premières places du podium. Lizette Ngalim retrouve cette année un fauteuil de championne qu’elle avait cédé en 2016 à la détentrice du record des victoires consécutives Yvonne Ngwaya.

La jeune femme qui n’a pas encore trente ans a rejoint la grande vedette de l’Ascension Sarah Liengu Etonge en 2016. Avec son 7ème succès l’an passé, elle a égalé le record de victoires de la légende vivante. Comme elle nous le confiait en 2016, Yvonne Ngwaya  aspire désormais à des succès à l’étranger.  La jeune reine de l’Ascension a déjà récolté la rondelette somme de 55 millions de francs CFA représentant les diverses primes récoltées en 9 années de participation à l’Ascension.  « Avec cet argent j’ai changé la vie de ma famille. Je m’offre ce dont j’ai besoin, je m’occupe de mes jeunes frères, je leur fournis ce dont ils ont besoin ».  Sarah Liengu Etonge quant à elle est la figure la plus emblématique de l’Ascension du « Char des dieux » -c’est le surnom du Mont Cameroun-. Cette mère de sept enfants tous nés avant qu’elle ne commence à courir a participé à 16 éditions de l’épreuve. Elle a été faite « Reine de la montagne » en 2008 par le ministre des sports et de l’éducation physique de l’époque. C’était au moment où elle prenait sa retraite pour la première fois. Peu avant, ce sont les autorités de l’université de Buea, sa ville » qui l’avaient faite « Docteur des montagnes ».

Pierre Arnaud Ntchapda

 

 

 

 

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