Willy James Nguekam : « La Fédération camerounaise de muay thaï fonctionne dans l’anarchie totale » 

L'équipe de la rédaction d'Africa Top Sports




Le père du muay thaï camerounais est retourné dans son pays au début de ce mois  de février. Willy James Nguekam est venu aider à l’organisation du gala international tenu le 3 février 2018 à Douala. Ce fut l’occasion pour lui de voir comment germe la semence jetée en 2012, année où il obtient des autorités camerounaises l’agrément qui lui permet de faire créer  la Fédération camerounaise de muay thaï et disciplines affinitaires. Seulement, l’expert et représentant du Cameroun à l’Ifma (International fédération of muay thai amateur), la Fédération internationale, est amer. Il estime que les dirigeants de ce sport dans son pays ne font rien pour que la discipline progresse de façon sereine. Mais le formateur, fabricant de champions du monde, ne se décourage pas.  Il promet de se battre pour que tout rentre dans l’ordre. Voici ce que Willy James Nguekam a dit à Africa Top Sports.

Vous avez assisté au premier gala international de Muay ThaÏ organisé le 3 février 2018 à Douala. Quel commentaire vous inspire ce que vous avez vu sur le ring ?

En ma qualité de dépositaire du muay thaï au Cameroun et d’expert mondial, j’ai vu qu’au  Cameroun il y avait beaucoup de changements au niveau tactique. Il y a un grand progrès au niveau de l’arbitrage et aussi du mental. Ce sont des choses qui regroupent et qui favoriseront encore plus dans l’avenir le développement du muay thaï dans notre pays. Il y a beaucoup de jeunes qui m’ont tapé dans l’oeil.  J’étais d’ailleurs très surpris de voir des Camerounais tenir tête à des boxeurs français. Ce n’était pas mal même si les Français ont remporté  des victoires. Mais il faut dire qu’il y a des pépinières au Cameroun. Il ne faut pas oublier que les 2èmes championnats d’Afrique de muay  thaï vont se tenir au Gabon l’année prochaine. Le Cameroun va y participer avec une très bonne équipe.

Vous êtes celui qui a introduit le muay thaï au Cameroun. Racontez-nous comment les choses ont commencé.

Etant en Occident, ayant travaillé avec des Thaïlandais, possédant mon propre club à Paris ma ville de résidence et en tant qu’expert mondial de muay thaï , j’ai pris l’initiative de ramener cette discipline dans mon pays où elle n’existait pas. J’ai eu la chance d’obtenir l’agrément  du ministère en charge des sports en 2012. Ceci après un dur labeur car nous avions déjà eu des champions du monde  camerounais comme Dany Billé, Daniel Lontsi, Pierre Célestin Yana, Herbert Woumaleu, Patrick Ndjana qui est au Cameroun en ce moment et est le responsable de la salle JC. Nous avons des compatriotes talentueux à l’instar de Mabel qui a été 4 fois champion du monde. Cela fait longtemps que j’œuvre pour le muay thai nous voyons le résultat et cela me fait plaisir.  Par contre il faut savoir que, pour que les choses puissent marcher, il faudrait que l’ordre revienne chez les administrateurs. Sur ce plan nous sommes encore loin derrière.  C’est encore difficile de prendre des boxeurs ici au Cameroun pour les emmener en compétition internationale.  Pour les tout premiers championnats d’Afrique du   amener  d’Europe le boxeur, John Mbeleck, qui a obtenu une médaille d’argent. Une première dans l’histoire du muay thaI camerounais. Heureusement parce que je suis membre de l’Union africaine de muay thai responsable de la sous-région Afrique centrale et représentant de la fédération internationale auprès de la fédération camerounaise  de muay thai et disciplines affinitaires. Quand les choses ne marchent pas j’ai le devoir d’informer la fédération internationale.  Pour le moment, je suis encore en train d’observer. Après je ferai un rapport écrit à l’instance internationale afin que nous puissions gérer les choses autrement.

Les choses ne seraient-elle pas en train de se mettre  en place comme vous le souhaitiez ?

Effectivement. Nous n’en sommes qu’à la première édition d’un gala international alors qu’on aurait pu être à la 5ème ou à la 6ème.  Des structures-mécènes comme « Africa Security » veulent investir dans la jeunesse, prendre des responsabilités avec une entreprise comme « Océan concept »  qui a eu l’idée de faire cet événement et que je n’ai fait qu’accompagner en ma qualité d’expert des fédérations  internationales. Ceci dit, il serait temps que les membres de la fédération  reviennent sur terre afin de mettre en place une synergie qui permettrait à ce que l’ensemble de la jeunesse puisse être réunie afin que les choses soient vues autrement.

Vous estimez que la Fédération s’endort…

Elle s’endort, il faut le dire. Nous avons des membres du bureau qui sont incompétents. On ne peut pas avoir au sein d’une fédération comme la nôtre des fonctionnaires du ministères des sports et de l’éducation physique qui sont  des cadres de notre fédération mais qui n’arrivent pas à suivre un dossier au niveau du ministère. Ce n’est pas possible !.  La Fédération fonctionne dans l’anarchie totale. Les gens ne sont pas à leurs places ! Les présidents  sont des dictateurs alors que normalement dans une fédération, le président doit se concerter avec son  comité directeur avant de prendre une décision, mais ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Je parle maintenant au responsable de la fédération continentale que vous êtes aussi. Comment le muay thaï évolue-t-il ailleurs sur le continent ?

Les choses vont très bien. Voyez par exemple le Maroc qui a œuvré pour que se tienne les premiers championnats d’Afrique. C’était historique et c’était soutenu par le Roi. Figurez-vous qu’il y a eu au moins 10 nations à cette compétition. Heureusement que j’étais là pour le Cameroun avec un boxeur venu de France. Qu’aurais-je dit aux instances internationales ? On serait peut-être suspendus ! Il faut penser à ça ! Il faut penser à la jeunesse !  Les autres pays ont mis en place une bonne politique de développement et ça prend de l’ampleur. Je suis d’ailleurs sollicité par les Gabonais qui aimeraient qu’on les aide dans ce sens.  A ce jour les Thaïlandais qui sont les parrains de cette discipline ont envie de promouvoir  le muay thaï sur le continent africain.

Parlons de vous maintenant. Comment est née votre relation avec  le muay thaï ?

Je possède à Paris un club au sein duquel  j’enseigne cette discipline.  Partant de là je suis allé en Thaïlande avec des boxeurs camerounais. Voilà comment tout a commencé. J’ai aussi pratiqué le muay thai. J’ai participé aux championnats  du monde en Thaïlande, reçu des experts mondiaux de nombreuses formations. J’ai ramené  en tant qu’encadreur des athlètes qui ont remporté des titres mondiaux. J’ai tout découvert à l’étranger et j’ai décidé de venir partager cette passion pour le muay thaï avec mes compatriotes, donner à la nation ce que j’ai reçu de l’Occident et l’Asie.   Je rêve de voir le muay thaï pratiqué dans tout le Cameroun, dans les établissements scolaires. Et aussi que le Cameroun soit représenté sur le plan international avec une très bionne équipe nationale pour que les jeunes puissent s’exprimer  et que nous ayons une bonne fédération qui vienne en retour avec de très bons partenaires pour pouvoir assurer à ceux qui arrivent une bonne formation  en muay thaï.

Propos recueillis par Pierre Arnaud Ntchapda   


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