Cameroun: Steve Mvoue, le crack

L'équipe de la rédaction d'Africa Top Sports




Le milieu de terrain camerounais, champion d’Afrique avec les Lions cadets du Cameroun, a été deux fois Homme du match de la CAN U17 en plus du titre de meilleur joueur d’Afrique décroché en finale le 28 avril 2019 en Tanzanie.

Son élégance, sa simplicité, sa précision sur le terrain, donnent l’impression qu’il s’amuse plus qu’il ne joue. L’âme d’un enfant, l’innocence aussi mais un vrai guerrier au fond. Sa gueule d’ange lui confère une sympathie certaine, une fragilité assumée à demi. Steve Régis Nani Mvoue (183 cm, 70 kg), milieu de terrain, est l’étoile de la coupe d’Afrique des nations Total des moins de 17 ans disputée en Tanzanie du 14 au 28 avril 2019. Avec le Cameroun, il a décroché le Graal : le titre de champion mais également deux trophées d’Homme du match (contre la Guinée en match de groupe et en finale) et l’ultime reconnaissance : celle de meilleur joueur africain de la catégorie des moins de 17 ans. 16 ans que le Cameroun a décroché son premier titre en 2003 et voilà le pays qui revient avec ce crack qui veut simplement réussir dans ce rôle du « 10 » pur d’antan et émerveiller à chaque fois. Son jeu, souvent précis, fait de dribbles, d’appels justes, de passement de jambes a requis l’attention. Ce geste, on l’a vu exécuter au moins une fois à la CAN. Réception du ballon, pirouette, passement de jambes et frappe. C’est sa signature, une signature qu’il souhaite policer. D’ailleurs, il le sait, à 17 ans, le jeu est encore perfectible.

Mvoue, ballon dans les pieds à neuf mois. C’est l’héritier de cette mère, Régine Mvoué, première capitaine des Lionnes indomptables, hyper présente.  « Avant mon accouchement, je me disais que si c’est une fille, elle portera mon nom intégral : Régine Mvoue. Mais si c’est un garçon, ce sera simplement  Steve Regis Mvoue. Régis comme Régine, moi-même », évocation de ce moment quelques semaines avant la naissance du champion au quartier Odza à Yaoundé le 2 février 2002.  Evocation d’une carrière qui se dessine au berceau. « Il a commencé à m’impressionner quand il avait neuf mois. Il rampait, récupérait le ballon de son frère aîné (ndlr, Stéphane Thierry Zobo) que j’essayais de jouer avec eux en faisant quelques travaux. En rampant, Steve venait, tirait le ballon et le frappait. Ce geste a surpris mon frère cadet la première fois m’a dit que celui-ci sera un joueur. Après, je me suis mise à l’observer. J’ai compris que ce nom était exceptionnel parce qu’à l’époque, frappait dans un ballon de foot sans marcher (silence).J’ai réalisé que le nom qu’il portait le pousserait à aller loin ».

Suivent de nombreux défis dans les cours de récréation. Sur les traces de son frère aîné, Stéphane Thierry Zobo, Steve Régis Mvoue va rejoindre le Centre de formation « familial » : Azur Star International, avec sa mère aux commandes dans le rôle du coach. « Il a commencé à 4 ans à Azur. C’était formidable les débuts », se souvient la coache. « Je jouais défenseur central. Puis, un jour, lors d’un match, faute de place, j’ai été positionné au milieu de terrain. J’ai apprécié. Les matchs suivants, j’ai manifesté mon envie de poursuivre au milieu de terrain. Je ne savais pas que les sélections nationales jeunes existaient. Mon jeu se limitait à toutes les compétions informelles organisées et d’autres championnats portant les noms de gloires. Je ne pensais à rien d’autre qu’au football », raconte le meilleur buteur des éliminatoires de la CAN (4 buts en trois matchs).

Au fil des ans, avec son frère, s’installe une saine rivalité décrite par le cadet. C’est ce qui les motive, les pousse à toujours offrir le meilleur de soi. « Nous nous lançons toujours des challenges. Il a été chez les U17. Il a inscrit 5 buts lors des éliminatoires sous une formule différente. A moi, il a lancé le défi de battre son record. J’ai inscrit quatre buts. Il m’a chambré parce que je n’avais pas pu le rattraper. Je lui ai promis d’inscrire au moins trois buts à la CAN. Je ne l’ai pas fait mais j’ai été Homme du match tout comme j’ai réussi deux passes décisives », explique Steve Mvoue, sourire aux lèvres. Prochaine concurrence, inscrire un but lors de son premier match dans un championnat Européen plus rapidement que Stéphane Zobo.

Pépite du football jeune, Steve Mvoue a connu les sélections inférieures (U15 et U16). Un parcours qui l’a poussé à mettre entre parenthèses, l’école en classe de première. Mais des cours d’anglais et une formation en informatique vont appuyer sa formation. Si les parcours de Jean II Makoun, Alexandre Song, Stéphane Mbia ont contribué à l’inspirer au Cameroun, dans sa tête, c’est Paul Pogba. Son téléphone Androïd conserve son sésame : une dizaine de vidéos de matchs du champion du monde français. Des vidéos passées en revue à longueur de journée question de graver chacun des gestes de son idole, dans un coin frais de sa mémoire. D’ailleurs, Steve Mvoue ne manque aucun match du Français. Son aisance technique l’inspire. S’il a encore du mal  à équilibrer jeu offensif et défensif  comme l’exige son poste, Steve Mvoue a gagné en volume de jeu depuis sa toute première compétition d’envergure en 2017, au Mondial de football à Montaigu (France).

Pour ses coéquipiers en sélection, il incarne rigueur et discipline. Dans le groupe, personne ne se gêne à utiliser ces deux mots féminins pour le désigner. Il est « le modèle, un exemple dans la sélection, un meneur d’hommes. C’est la rigueur. C’est la discipline. A côté, il est très blagueur. Sur le terrain, il sait jouer son rôle, faire le boulot. D’ailleurs, avant les tirs au but en finale, il était confiant. Il a communiqué cette confiance au groupe. Je me réjouis de le connaitre depuis un moment déjà», confie le gardien de but Jacques-Bruno Mbeupap.

Des numéros 10 dans le monde, on s’en souvient assurément. Entre les Brésiliens Pélé et Ronaldinho ; les Argentins Maradona et Messi, le Français Zidane, l’Algérien Belloumi, le Nigeria Jay Okocha, le Ghanéen Abedi Pele les Camerounais Louis Paul Mfede et Patrick Mboma notamment, Steve Nani Mvoue pourrait bien suivre le chemin de ces illustres. C’est l’avis du sélectionneur, Thomas Libiih, ancien Lion Indomptable. « Qu’il soit meilleur joueur aujourd’hui ce n’est pas une surprise. Il a une qualité au-delà de la qualité, il y a très peu de joueurs même dans le championnat français, espagnol, italien qui sont encore des numéros 10. On trouvait des numéros 10 par le passé mais lui, est un génie. Il a une qualité assez extraordinaire. S’il arrive à grandir avec cela, il fera  une grosse carrière. C’est un joueur qui a un talent au-dessus de la moyenne ». C’est pourquoi, personne ne se doute que le crack a participé à cette CAN diminué. Non seulement il n’était pas au top de sa forme faute d’entraînement, en plus, il y avait ce bobo qu’il traîne à la cuisse depuis le début de la compétition.

Ce potentiel dévoilé doit assurément être entretenu. Pour cela, « tout dépendra de son comportement. Il devra rester humble, garder sa tête sur ses épaules pour avancer. Si ce n’est pas le cas, il va se perdre. Il doit continuer de travailler mais travailler doublement. Messi, Cristiano Ronaldo sont ce qu’ils sont aujourd’hui parce qu’ils sont restés positifs. Ils ont choisi ce métier. S’il arrive à transcender des choses, il aura une grosse carrière. Il m’a dit, il l’a dit à sa mère  que sa préoccupation est d’être le meilleur joueur de la CAN. C’est fait. Cela veut dire qu’il peut aussi garder une certaine discipline et se transcender  », recommande Thomas Libiih qui le voit bien au panthéon des légendes du football camerounais et pas que.

Le meilleur buteur des Eliminatoires avec quatre buts en trois rencontres sait où il va. « Je veux être Ballon d’Or Africain. Je veux être footballeur professionnel. Je ne me laisse pas distraire par des s tests au PSG, à Monaco, à Lens et à Toulouse. Je me focalise sur mon jeu », propos empruntés à Steve Mvoué. La carrière de sa mère lui parle, son frère, professionnel, lui met la pression, pas question de se distraire, il y a un avenir à bâtir, une participation au Mondial U17 (Brésil 2019) à préparer, davantage une histoire à écrire élégamment en lettres dorées. Au public, « Trust the Process ».

Angèle BEPEDE


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