URSSAF et portage salarial : les raisons de la discorde 

L'équipe de la rédaction d'Africa Top Sports





Les relations complexes entre l’URSSAF et le portage salarial sont la première source d’inquiétude des sociétés de portage salarial selon le premier rapport de branche du secteur. Quels sont les principaux désaccords avec l’URSSAF ?  Quelles pourraient être les conséquences pour les portés ? Quelles sont les solutions envisageables ? 

Le portage salarial, une longue bataille pour faire reconnaître un modèle de travail novateur

Si le portage salarial existe en France depuis plusieurs décennies, sa reconnaissance juridique et son statut réglementaire ont fait l’objet d’un long travail engagé par les sociétés de portage salarial et leurs syndicats. 

En 2015, une première grande victoire a permis à tous les portés de bénéficier enfin et de manière systématique de l’ARE de Pôle Emploi. Avec la convention collective signée en 2017, le statut et l’encadrement du portage salarial sont désormais une chose acquise. 

Cependant, les spécificités du portage salarial génèrent encore de nombreuses incompréhensions. C’est notamment le cas avec l’URSSAF en charge de la sécurité sociale des indépendants qui a lancé plusieurs redressements contre des sociétés de portage salarial portant sur le paiement des cotisations sociales et patronales, sans prendre en considération la spécificité du portage. 

Sociétés de portage salarial : des particularités qui doivent être prises en compte

Une société de portage salarial héberge des professionnels qui ont un statut à mi-chemin entre l’indépendance et le salariat. Ils prospectent eux-mêmes leurs clients, sont maîtres de leur tarification et de leur planning de travail. Leur société de portage salarial leur fournit un contrat de travail qui leur garantit les avantages du statut de salarié. Leur chiffre d’affaires est transformé en salaire une fois avec retenue dles cotisations sociales salariales et patronales réglées. 

D’autres avantages leur sont fournis par leur société de portage comme la gestion de leurs frais professionnels inhérents à leur activité. Ces frais déclarés chaque mois par les consultants et remboursés sur justificatifs par leur société de portage salarial sont exonérés de cotisations sociales et patronales. Les sociétés de portage proposent également l’avance de rémunération. Les salaires des consultants sont ainsi versés en totalité indépendamment du règlement de la facture par le client. 

Or ces pratiques particulières au portage salarial sont à l’origine de redressements par l’URSSAF pour différentes raisons. 

Les temps partiels, les frais de déplacement et les avances sur salaire dans l’œil du viseur de l’URSSAF

Temps partiels

Selon le premier rapport de branche, seulement 37% des portés sont déclarés à temps plein. Le temps partiel est donc une pratique généralisée en portage salarial mais qui n’est malheureusement pas reconnue par l’URSSAF en l’état car la répartition du temps de travail n’est pas définie avant la mission mais une fois la mission accomplie quand le porté remplit sont compte-rendu d’activité en fin de mois. L’abattement des cotisations sociales calculé pour un temps partiel en portage est remis en cause par l’URSSAF pour cette raison ! 

Frais professionnels

Contrairement aux micro-entrepreneurs, les portés peuvent déclarer à leur société de portage salarial des frais inhérents à leur mission comme les déplacements, les repas, l’achat de NTIC à leur société de portage salarial. L’intérêt pour le porté est que ces sommes lui sont remboursées net de cotisation. Si l’URSSAF reconnaît ses pratiques, elle les encadre fortement. Ainsi, l’URSSAF a considéré dans plusieurs cas que le lieu de travail du porté est celui de l’entreprise cliente et qu’en l’occurrence, il ne peut prétendre à des remboursements de frais de déplacements. 

Or ce n’est souvent pas le cas pour bien des professionnels qui mixent télétravail et déplacements chez le client. D’autre part, le porté est libre de choisir son lieu de travail selon sa convention.

Avances sur salaire

Grâce à leur solidité financière, certaines sociétés de portage salarial pratiquent des avances sur rémunération. C’est le cas de MISSIONS-CADRES et d’UMALIS. Quand un porté a réalisé une mission, il peut, sous réserve, obtenir tout ou partie de sa rémunération sous forme d’avance avant le paiement de la facture par le client final. Encore une fois, l’URSSAF estime que les cotisations sociales salariales et patronales sont dues dès le paiement de l’avance et non au moment du paiement de la facture finale. Ainsi des redressements pour ce qu’ils considèrent des retards de paiement sont lancés. 

Quelles conséquences pour les portés ?

Les portés sont directement concernés par ces redressements car ils mettent en péril le modèle économique du portage salarial ! A terme, ils pourraient conduire à des hausses de cotisations sociales pour les portés (temps partiel sans abattement de cotisations sociales, non remboursement des frais de déplacement, avances sur salaire rendues impossibles de facto). 

C’est pour cette raison que beaucoup d’acteurs du secteur entament des procédures en justice pour dénoncer une mauvaise compréhension et un manque d’adaptation de l’URSSAF sur le sujet. 

UMALIS obtient gain de cause devant le Tribunal d’Instance face à l’URSSAF ! 

C’est une première en matière de contentieux ! Après un redressement de l’URSSAF estimant que les cotisations sociales étaient dues dès l’avance de rémunération du porté, le groupe UMALIS dont fait partie MISSIONS-CADRES a porté l’affaire devant les tribunaux. Le 3 septembre 2019, le Tribunal d’Instance a rendu son jugement en faveur d’UMALIS rappelant deux principes, l’un sur la forme et l’autre sur le fond : 

  • Le manque de précision des mises en demeure envoyées par l’URSSAF à la société : aucune cause ou origine des dettes explicites.
  • Le moment où sont dues les cotisations sociales à l’URSSAF : sur ce point le Tribunal a rappelé qu’aucune cotisation sociale ne pouvait être exigible avant la preuve du travail effectué, à savoir le paiement de la facture par le client.

Cette première décision de justice est une grande avancée pour l’ensemble du secteur du portage salarial ! Les efforts à faire pour éviter que le portage salarial ne soit mis en danger restent importants et font d’ores et déjà l’objet de réflexions menées par les partenaires sociaux et le PEPS. L’objectif est d’aboutir à une vraie prise en compte des particularités du portage salarial par les administrations, dont l’URSSAF.

Pour plus de détails sur le sujet, un article publié dans le Guide du Portage :

https://www.guideduportage.com/actualite/paiement-cotisations-urssaf-portage-salarial-victoire-secteur

Pour Christian PERSON, le fondateur et PDG de UMALIS GROUP SA, seule société de portage salarial cotée en Bourse, « il semble évident que c’est l’encaissement des factures adressées aux clients des salariés portés qui détermine la date d’exigibilité des cotisations sociales. Cette jurisprudence peut faire gagner à l’ensemble de la profession du portage salarial, des centaines de Millions d’Euros indûment exigés par les URSSAF« .


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